Stratégie & Innovation

État des lieux : mesurer l’impact des projets innovants

3.6.2024
2
min.
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Face aux pressions constantes venant des législateurs, des consommateurs et des financeurs, il devient difficile, voire impossible, pour les entreprises de passer à côté de l'impact : le créer, mais également le mesurer.

De toutes parts, on voit donc des entreprises, des associations, des organismes de recherche se saisir du sujet de la mesure d'impact, y compris pour leurs projets innovants. Pourtant, la tâche est complexe.

Un problème de définition

Premièrement, la notion même d'impact et ses composantes ne font pas consensus. "L'impact" est devenu un mot un peu fourre-tout, qui, selon les acteurs, englobe différentes choses.

Il peut être connoté négativement ou positivement (ainsi, "avoir un impact environnemental" peut vouloir dire "avoir une empreinte détrimentale sur l'environnement" ou "améliorer l'état environnemental du monde", selon les contextes).

Selon les perspectives, la notion d'impact peut englober, ou non, l'aspect environnemental, l'aspect sociétal, et l'aspect économique, voire d'autres aspects encore (par exemple, l'impact scientifique).

Un problème de scope

Les indicateurs existants sont souvent conçus :

  • Pour une mesure a posteriori des actions menées : à la fin de la campagne ou du programme, à la fin de l'année écoulée, voire plusieurs mois/années après.
  • Pour l'activité globale d'une organisation ou d'un programme.

Initialement, la mesure d'impact était également une question réservée aux entreprises dites "sociales" ou "à mission", dont l'un des objectifs clairement affichés est de créer un impact environnemental positif ou de s'adresser à une population marginalisée pour améliorer sa qualité de vie. Depuis la démocratisation (et l'obligation pour certaines organisations) des rapports RSE, l'évaluation de l'impact s'est élargie à d'autres types d'organisations, mais elle est souvent qualitative et non standardisée, à part pour la question du bilan carbone.

De nombreuses tentatives d'élaborer un SRL (Societal Readiness Level), indicateur jumeau du TRL (Technological Readiness Level) appliqué à l'impact sociétal de l'innovation, ont été menées. Néanmoins, ces indices sont très hétérogènes et ont eux-mêmes des visions différentes de ce qui doit être mesuré et comment il doit être mesuré.

Un problème d’intérêts divergents

Les financeurs sont de plus en plus demandeurs, voire exigeants, que les projets innovants fournissent une évaluation de leur impact (environnemental et sociétal, principalement).

Néanmoins, chaque évaluateur va également fournir sa propre grille, avec ses propres indicateurs, qui est le reflet de son prisme sur la notion d’impact. Les règles du jeu ne sont donc pas homogènes selon qu’on s’adresse à BPI, à l’ADEME, à l’Europe, ou à un financeur privé.

Certaines grilles vont se limiter à la mesure des rejets de gaz à effet de serre, d’autres vont s’intéresser à la circularité de la solution proposée, d’autres encore à la réduction des inégalités, etc. Cela signifie, entre autres, qu’un projet peut tout à fait avoir un impact pour un évaluateur, mais pas pour un autre. Et que “l’importance” de cet impact dépend de la grille d’évaluation.

Encore du chemin à faire

Même si les choses vont dans la bonne direction, il manque donc aux porteurs de projets un moyen simple et holistique d'évaluer l'impact environnemental et sociétal de leur projet a priori, avant que celui-ci n'atteigne le marché. Une mesure qui ne soit pas limitée à la perspective d'un seul acteur, mais qui puisse être valorisée de façon globale.

Un tel outil permettrait aux entrepreneurs de prendre du recul et de positionner leur projet : comment et dans quelle mesure celui-ci compte-t-il améliorer le monde dans lequel nous vivons ? Cela permettrait également de maximiser cet impact, afin qu'il exploite son plein potentiel d'amélioration. Et n'est-ce pas là l'objectif que devrait poursuivre tout innovateur, dans le monde actuel ?

Quelques sources

Sur le flou artistique autour de la notion d’impact :

  • Bührer S., Feidenheimer A., Lindner R., Beckert B., Wallwaey E., “Concepts and methods to measure societal impacts : an overview” (2022). Fraunhofer ISI Discussion Papers - Innovation Systems and Policy Analysis No. 74
  • Rawhouser, H., Cummings, M., & Newbert, S. L. (2019). Social Impact Measurement: Current Approaches and Future Directions for Social Entrepreneurship Research. Entrepreneurship Theory and Practice, 43(1), 82-115.

Quelques tentatives de la recherche de développer ou analyser une mesure de l’impact :

  • Phillips, P., Moutinho, L., & Godinho, P. (2018). Developing and testing a method to measure academic societal impact. Higher Education Quarterly, 72(2), 121-140.
  • Gibbon, J., & Dey, C. (2011). Developments in Social Impact Measurement in the Third Sector: Scaling Up or Dumbing Down? Social and Environmental Accountability Journal, 31(1), 63–72.

Léa Bunnens

Directrice R&D - Docteure - Experte de l'innovation de Business Models

Un pied dans la recherche, l’autre dans les projets d’innovation, la mission principale de Léa est de faire davantage dialoguer ces deux mondes. Au quotidien, les projets qu'elle aide à faire émerger lui permettent de construire de nouvelles méthodes et outils destinés à augmenter les chances de succès des projets suivants. Sa spécialité : détecter la bonne opportunité, construire la meilleure idée possible, et lui offrir le business model optimal.

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